Défaut de prévoyance ou de mutuelle : quels risques pour l’employeur ?

Défaut de prévoyance ou de mutuelle : quels risques pour l’employeur ?

Cette question peut sembler surprenante mais la position de la Cour de Cassation l’est tout autant.

En effet, un employeur doit veiller à affilier son salarié à un organisme de prévoyance, conformément aux dispositions de sa convention collective. Pour rappel, la prévoyance est un terme générique pour parler des contrats d’assurance qui préviennent les risques liés à la personne. Les risques couverts sont le décès, l’incapacité de travail ou l’invalidité.

Si, du fait d’une carence de l’employeur, le salarié ne perçoit pas les prestations auxquelles il aurait pu prétendre en vertu du régime de prévoyance, le juge peut condamner l’employeur à l’indemniser à hauteur des prestations non perçues. Il en va ainsi si l’employeur a omis de l’affilier au régime conventionnel ou s’il n’a pas déclaré un sinistre dans le délai prescrit.

Mais qu’en est-il lorsque c’est le salarié, lui-même, qui ne fournit pas à l’assureur les justificatifs nécessaires à son indemnisation ?

La Cour de Cassation, dans un arrêt du 22 juin 2017, a estimé que, malgré le fait que le salarié n’avait pas communiqué à l’organisme de prévoyance ses décomptes d’indemnités journalières de sécurité sociale (IJSS), nécessaires au calcul des indemnités complémentaires prévues par le régime de prévoyance (ne permettant ainsi pas le versement au salarié), l’employeur restait responsable. Des dommages  et intérêts ont dû être versés au salarié. Dans cette affaire, l’organisme avait averti l’employeur, par courrier, que le salarié ne transmettait pas ses décomptes d’IJSS.

Eu égard à cet arrêt, l’employeur doit solliciter auprès du salarié la remise des justificatifs, s’il est informé d’une carence de ce dernier. Pour cela, nous lui conseillons d’adresser un courrier au salarié (remise en main propre contre décharge ou lettre recommandée avec accusé réception) pour lui demander de transmettre les justificatifs demandés à l’organisme de prévoyance et attirer son attention sur les conséquences sur ses droits à prestations en cas d’abstention. Cette position semble alourdir les obligations de l’employeur quant à la gestion de la couverture prévoyance dans l’entreprise.

De manière générale, il est à rappeler que l’employeur doit veiller à ce que son entreprise et ses salariés soient affiliés aux organismes de retraite, prévoyance, complémentaire frais de santé (mutuelle).

Depuis le 1er janvier 2016, l’employeur doit proposer à tous ses salariés une complémentaire frais de santé, sans condition d’ancienneté, conformément aux dispositions réglementaires en vigueur.

Il existe des cas de dispense à l’affiliation à la mutuelle, mais seul le salarié peut demander à en bénéficier. Si un salarié souhaite ne pas être affilié à la mutuelle, en invoquant un cas de dispense, il doit présenter à son employeur une demande de dispense, prévue par les dispositions légales, écrite et signée (justificatif). Mais l’employeur doit, dans un premier temps, la lui proposer. A défaut de pouvoir bénéficier d’une dispense, la mutuelle est applicable  au salarié, ce qui signifie qu’elle sera mentionnée sur les bulletins de paie (cotisations patronales et salariales seront prélevées).

Un employeur n’ayant pas proposé de mutuelle obligatoire pourra se voir assigné en justice par ses salariés par l’intermédiaire des prud’hommes. La responsabilité de l’employeur pourra même être engagée en cas d’accident du travail non pris en charge mais qui aurait dû être remboursé par la mutuelle obligatoire. Dans cette situation, la justice pourra alors lui demander de payer les frais médicaux.

Il appartient également à l’employeur de remettre à ses salariés toutes les notices ou informations (conditions générales, garanties..) adressées par les organismes auxquels l’entreprise a adhéré, en ce qui concerne les garanties prévoyance et frais de santé.

L’employeur doit être en mesure d’apporter la preuve que son salarié a été informé de ses droits liés aux garanties. A défaut, la responsabilité de l’employeur pourrait être engagée si le salarié demande réparation de son préjudice (appréciée par les juges) pour défaut d’information.